Extrait

Dans Amélia et les papillons, j’explore le pouvoir de guérison qui réside en chacun de nous. Cet extrait résume en quelque sorte une vérité que trois personnages différents répètent à Amélia : il ne faut jamais sous-estimer le pouvoir d’un rêve. J’en sais quelque chose!

« Amélia vivait les plus beaux jours de sa vie. Mais ayant été blessée par le passé, elle ne parvenait pas à apprivoiser ce bonheur simple sans appréhension. Dès qu’elle ressentait de la joie, elle faisait le compte mentalement en ajoutant une part de larmes à la colonne des débits qu’elle devrait payer tôt ou tard. Ainsi, elle accueillait tous les petits plaisirs du bout du cœur, convaincue qu’elle se ferait écorcher dans le détour. En conséquence, elle acceptait avec difficulté la bonté et l’amour d’Angelo qui veillait sur elle comme sur un nourrisson.
Parallèlement à ses nouvelles activités, Amélia s’autorisait à suivre le conseil du renard en rêvant de temps à autre. Elle faisait même des rêves éveillés au cours desquels son esprit voyageait dans des pays merveilleux où elle goûtait à tous les plaisirs s’offrant à elle. Angelo sut d’emblée qu’il ne fallait pas déranger sa cousine lorsqu’elle rêvassait. Il faisait preuve de patience en la laissant terminer son voyage et parfois, à son retour, elle lui racontait ses périples.
Une fois, elle visita un territoire au paysage dominé par de vertes collines. Elle fut si impressionnée qu’elle en parla à Angelo pendant des jours, décrivant le contraste des verts, le bleu du fleuve qui traversait la campagne, le parfum des orangers et même le vol rigolo des colibris dans le maquis. Angelo ne se lassait pas de l’écouter. Amélia avait un tel talent de conteuse qu’il pouvait voir, lui aussi, ces collines et suivre le vol des oiseaux.
Un jour, Amélia demanda à Angelo s’il lui arrivait de rêver. Il lui raconta alors le rêve l’ayant le plus marqué, celui qui l’avait conduit à planter un chêne au domaine des Hautbois.
– Et tu as cru ce Méda quand il t’a dit que tu devais planter un arbre?
– Regarde à ta fenêtre. Tu vois bien que je l’ai cru.
– Tu crois donc aux rêves, dit Amélia.
– Pas toi?
– Non. C’est-à-dire que j’aimerais bien… Il y a un rêve que j’ai fait à quelques reprises et dans lequel je me transforme en papillon.
– En papillon? Comme ça doit être agréable, dit Angelo.
– Oh oui, si tu savais! Je suis libre et si légère, et il y a plein de papillons avec moi, et nous volons dans la campagne et…
– Mais c’est merveilleux! l’interrompit Angelo. Tu aimerais être un papillon?
– Oh oui!
– Eh bien, continue de rêver. On ne sait jamais.
Amélia posa les yeux sur son chêne grandiose en se disant que si le rêve d’Angelo avait pu changer sa vie, il pourrait en aller de même pour elle. »